L’archipel du non-advenu

samedi 7 juillet 2012 Commentaires fermés sur L’archipel du non-advenu

Le Trésor de la langue française informatisé définit advenir comme « se produire, comme une chose possible, mais de manière non absolument prévisible, quoique attendue. ». Le non-advenu n’est donc qu’un tout petit archipel dans l’océan de ce qui ne s’est pas produit. Il se compose de ce qui n’est pas arrivé, aurait pu le faire, et si c’était arrivé, nous aurait pris un peu par surprise alors même que nous l’attendions. Le non-advenu est un archipel pour la raison simple qu’il a plusieurs îles. Il y a celle des choses qui auraient pu arriver et mince on les a loupées, trop tard, dommage, foutu. C’est l’île du regret, avec sa terre pauvre où ne poussent que des plantes amères. Il y a l’île des choses qui n’ont pas encore eu le temps d’arriver, trop tôt, pas prêt, s’est pas trouvé. Elle est grande, et d’où qu’on la regarde on n’en voit jamais qu’une petite partie. L’île de la sérenpidité, malgré sa poétique attraction, n’appartient pas à l’archipel du non-advenu, parce que les choses qui l’habitent sont absolument inattendues, non seulement dans leur survenue mais aussi dans leur nature et leurs conséquences.

L’archipel du non-advenu contient cependant un petit atoll, que de nombreux cartographes ont ignoré mais qui n’a pas échappé aux sagaces philosophes. L’un d’entre eux remarquait : « à chaque instant quelque intention jaillit à nouveau de moi, ne serait-ce que … vers les instants qui adviennent et repoussent au passé ce que je viens de vivre. »1 C’est l’atoll du toujours presque là, où chaque instant s’échappe pour faire place à un autre peuplé de la même attente. On y rencontre des promeneurs un étrange sourire aux lèvres qui ne savent pas quand se produira ce qui peut advenir, mais qui l’appellent à chaque instant.

  1. Merleau-Ponty dans Phénoménologie de la perception, toujours selon le TLFi. []

Tagged ,

Comments are closed.

meta