La vie rêvée des fleurs

dimanche 11 août 2013 Commentaires fermés sur La vie rêvée des fleurs

couverture de La vie cachée des fleurs

Qui photographie les fleurs de près découvre avant tout la diversité de leurs organes sexuels et de leurs complices. Fort ignorant en botanique, j’ai eu la chance de me procurer dans l’excellente librairie ambulante Les idées des autres1 un exemplaire du livre La vie cachée des fleurs de J-M. Guilcher illustré de photographies de R-H. Noailles2.

Je suis heureux de partager l’éclairage qu’apporte cet ouvrage sur des pratiques assez évocatrices des fleurs. Dans un premier temps, leur vie sexuelle peut paraître un peu frustrante, car la relative immobilité des fleurs limite les contacts directs de leurs organes sexuels et les force à recourir presque systématiquement aux services de tiers (voir plus bas) se déplaçant des uns aux autres.

Ne nous y arrêtons pas. En effet, même avant internet, la littérature a déjà imaginé des formes de sexualités reposant sur de tels tiers, notamment dans la nouvelle de Philip Jose Farmer Ouvre-moi, ô ma sœur à laquelle j’ai déjà rendu hommage sur ce site.

Les messagers des hermaphrodites

organes sexuels de la fleur de coquelicot

Les hermaphrodites (fleurs pourvues au même moment d’organes sexuels femelles et mâles) constituent le groupe le plus important au sein des fleurs. La fugitive fleur de coquelicot à droite est pourvue d’un impressionnant pistil (féminin) décoré de très seyants stigmates et entouré de fragiles étamines (masculines)3. Le pollen abondant sur les étamines ne compte que sur le vent agitant la fleur pour se déposer sur les stigmates du pistil.

Si les plaisirs de la brise sur la peau ne sont plus à vanter, le coquelicot en reste à une variété subtile d’onanisme . D’autres fleurs (hermaphrodites ou limitées à un seul sexe) ont trouvé bien mieux. Elles obtiennent de la part d’insectes pollinisateurs des stimulations adéquates pour leurs organes sexuels. Il y là un double avantage : aux satisfactions procurées par les messagers s’ajoutent les relations tissées avec d’autres coquelicots, pour des raisons que seule la timidité des botanistes imagine limitée à la reproduction.

chardon bleu et pollinisateur

Dans le cas du vanillier, ce rôle important est attribué aux êtres humains, hommes aux Antilles et femmes en Polynésie. A l’origine, une abeille s’en chargeait mais elle n’habite qu’au Mexique alors que la culture des vanilliers s’est déplacée ailleurs4.

Transexualités

La fleur de sauge est d’abord mâle puis femelle. Du fait que ce n’est pas en même temps, il faut qu’un insecte pollinisateur (le bourdon, en l’occurence) porte le pollen d’une fleur mâle vers une femelle plus mature. les fleurs de sauge expérimentent donc deux sortes de sexualité, d’abord mâle puis femelle. D’autres fleurs font ça dans l’autre sens, comme l’aristoloche, d’abord femelle puis mâle.

Triolisme banal

Sans transexualité, les fleurs dites sexuées pratiquent le triolisme entre une fleur femelle, une mâle et un comparse (vent ou insecte butineur). On notera que ces fleurs sexuées sont moins courantes que les hermaphrodites, sans doute parce que ces dernières ont développé des mécanismes de recours à l’autofécondation dans le cas où les autres méthodes échouent qui leur ont procuré un avantage évolutif. Pour conclure, notons l’innovation remarquable dont font preuve les fleurs en matière de formes de leurs organes sexuels.

stigmates en croix

Photos couleur : Philippe Aigrain

  1. Animée par Julien Moreau et parcourant la Bigorre, cet étal m’évoque la librairie ambulante tirée par un cheval du Parnassus on Wheels de Christopher Morley. []
  2. Edité en 1950 dans l’Atelier du Père Castor, Flammarion. []
  3. Photographie tirée de l’ouvrage déjà mentionné. []
  4. https://nature.jardin.free.fr/orchidee/vanilla-fecondation.html. Georges Limbour en a tiré une belle inspiration littéraire dans Les vanilliers. []

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