Intermezzo (3)

lundi 19 octobre 2015 Commentaires fermés sur Intermezzo (3)

Depuis le temps qu’on s’y attendait, ça a fini par être une surprise. Artemis et Dyonisos sont à la colle. Physiquement. Ne se décollent pas l’un de l’autre. À part ça, peu de modifications de leur mode d’interaction, la proximité semble même intensifier leurs malentendus. Pour la télépathie, on ne sait pas trop, vu qu’il n’est plus très sûr qu’ils pensent à autre chose qu’à se coller. L’inquiétude est grande. Pas pour eux, mais pour leurs personnages. Déjà maltraités, ils risquent maintenant d’être laissés à eux-mêmes.

Et puis de sombres menaces s’accumulent pour le Petit théâtre des dieux. Un mystérieux consortium mène campagne contre la concurrence déloyale que de telles troupes livreraient à ses membres. Protestent-ils contre les activités divines ou contre celles théâtrales ? Côté dieux, en veulent-ils au polythéisme, aux pratiques dépravées des dieux concernés ou à l’usurpation de titres et fonctions ? En tout cas, côté théâtre, le consortium veut réserver le mot aux professionnels et assécher les maigres et informelles ressources qui assurent la surprenante durabilité du Petit théâtre des dieux et de ses semblables. Au moment même où l’on traite une part des professionnels comme des amateurs à qui on fait la faveur d’une bribe de notoriété et s’ils insistent vraiment de maigres cachets ou de quelques heures d’intermittence voilà qu’on accuse les amateurs de leur marcher sur les pieds. Un lobbyiste déclare ainsi à la tribune d’un forum renommé :

« Le scandale est grand de voir des assistés mutualiser les ressources que leur fournit la collectivité pour conduire des activités auxquelles ils prennent plaisir au lieu d’accomplir leur devoir de consommation de produits culturels labellisés. Ne les voit-on pas rendre aujourd’hui à leurs pareils l’argent qu’ils reçu hier des mêmes ou d’autres du même acabit. Quel gâchis pour la circulation sans entraves de la monnaie dans les seules directions indiquées dont notre économie fragilisée a tant besoin. Si encore nous parlions de start-ups capturant avec efficacité les externalités positives des pratiques non marchandes pour installer le brillant futur de l’économie du partage. Mais non, il semble ne s’agir que de pérenniser ces pratiques dans leur misérable état et de leur permettre de gaspiller cette attention si rare dont nous avons tant besoin pour que survivent l’Art, l’audiovisuel et les marques. »

Heureusement, le Petit théâtre des dieux paraît pour l’instant passer sous le radar. Mais on s’inquiète de possibles effets de bord malencontreux.

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